Braquons les projecteurs sur le lupus!
La plupart des gens pensent à un certain inconfort et à des petites douleurs lorsqu’ils entendent le mot arthrite. On imagine également souvent que l’arthrite n’affecte que les personnes âgées. En réalité, l’arthrite regroupe plus de 100 maladies différentes, dont la polyarthrite rhumatoïde, la goutte, la fibromyalgie, l’arthrose et le lupus, et ces maladies peuvent frapper à tout âge. À titre d’exemple, on constate que de nombreuses personnes chez qui on diagnostique une arthrite due au lupus sont des jeunes femmes.
Le lupus est une maladie auto-immune chronique qui entraîne une inflammation généralisée de l’organisme et qui peut provoquer un dysfonctionnement des organes. On parle de maladie auto-immune lorsque le système immunitaire ne parvient plus à reconnaître ce qui est étranger, comme une bactérie ou un virus, et ce qui constitue les composants normaux de l’organisme. Le système immunitaire commence alors à attaquer les organes et à provoquer des réactions inflammatoires. Les problèmes qui en résultent sont parfois irréversibles.
Le lupus peut toucher n’importe quelle partie du corps, et en particulier le cœur, le cerveau, les reins et la peau. Chaque cas de lupus est différent. Certains patients peuvent avoir une éruption cutanée en forme d’ailes de papillon sur le visage ou souffrir de problèmes rénaux. D’autres sont victimes d’une atteinte cérébrale qui peut notamment provoquer des crises d’épilepsie, des psychoses et des hallucinations. Ces différences rendent le diagnostic du lupus difficile.
Pour répondre à certaines questions importantes sur le lupus, nous nous sommes entretenus avec la Dre May Choi, une chercheuse scientifique chez Arthrite-recherche Canada. La Dre Choi est une rhumatologue qui effectue des recherches pour comprendre comment le lupus se manifeste dans l’organisme.
Comment diagnostique-t-on le lupus?
En général, une personne consulte son médecin parce qu’elle présente déjà des signes et des symptômes de la maladie. Il peut s’agir d’une éruption cutanée, d’une perte de poids, de fièvre, d’une fatigue extrême ou d’arthrite, par exemple. Il s’agit ensuite de déterminer quels sont les autres signes et les autres symptômes qui se manifestent. On effectue alors un examen physique complet, car le lupus peut toucher n’importe quelle partie du corps, puis des analyses de sang et d’urine, des biopsies, des radiographies et des scanographies. Lorsque les résultats sont disponibles, un rhumatologue les examine pour poser un diagnostic.
Combien de temps faut-il pour diagnostiquer le lupus?
Cela varie en fonction de là où on habite. En moyenne, même dans un pays développé, les patients doivent souvent consulter plusieurs médecins ou spécialistes avant de recevoir un diagnostic officiel. Certaines études font état de 7 à 10 visites avant qu’un patient voie un rhumatologue capable de poser un diagnostic. D’autres mentionnent un délai de cinq ans avant un diagnostic formel et le début du traitement. Le diagnostic du lupus ne repose pas sur un seul test sanguin ou sur un seul symptôme. Il faut d’abord rassembler de nombreux éléments, un peu comme pour reconstituer un puzzle, et seul un médecin expérimenté dans l’observation du lupus peut poser un diagnostic fiable.
Quelles sont les personnes généralement touchées par le lupus?
Je vois beaucoup de jeunes femmes qui veulent fonder une famille ou qui veulent se lancer dans leur carrière. Ce sont souvent des jeunes femmes d’origine asiatique, africaine, hispanique ou autochtone. Les personnes qui ne sont pas de race blanche sont plus susceptibles d’être atteintes de lupus et de souffrir de complications plus graves.
Comment le lupus affecte-t-il la vie de tous les jours?
De nombreux symptômes du lupus peuvent être très invalidants et douloureux. Nous avons par exemple des articulations sur tout le corps et elles nous permettent de faire ce que nous aimons tous les jours. Pour certaines personnes atteintes de lupus, la douleur, les gonflements, les articulations qui chauffent et les raideurs peuvent les empêcher de travailler et de faire des choses simples comme s’habiller, se brosser les dents et se laver.
Quels sont les facteurs de risque du lupus?
Nous savons que la génétique joue un certain rôle, mais ce n’est pas parce qu’un membre de votre famille, comme votre mère ou votre père, est atteint de lupus, que vous en souffrirez un jour. Nous savons que d’autres facteurs entrent en ligne de compte. Les facteurs environnementaux, certains produits chimiques, les polluants ou le mode de vie jouent également un rôle. Le tabagisme, l’obésité et le manque de sommeil sont, par exemple, associés à un risque accru de lupus. L’environnement et le mode de vie jouent donc probablement un rôle aussi important que la génétique.
Qu’appelle-t-on biomarqueurs?
Les biomarqueurs sont des molécules présentes dans l’organisme. On les trouve dans le sang, les muscles ou tout autre fluide ou tissu corporel. Nous cherchons à savoir s’ils sont utiles pour diagnostiquer une maladie. Certains biomarqueurs spécifiques sont présents chez de nombreux patients atteints de lupus. Par ailleurs, d’autres patients ne présentent pas ces biomarqueurs, et les chercheurs pensent qu’ils possèdent des biomarqueurs uniques du lupus qui n’ont pas encore été identifiés.
Quel est le rôle des biomarqueurs dans le diagnostic précoce du lupus?
Je suis passionnée par la recherche sur les biomarqueurs qui peuvent nous aider à diagnostiquer la maladie plus tôt et avec plus de précision. La recherche a montré qu’on peut trouver ces molécules dans le sang dix ans avant le diagnostic. Si nous pouvons donc trouver ces biomarqueurs chez les patients avant même qu’ils présentent des symptômes, nous pouvons les conseiller sur les moyens de prévenir la maladie ou les aider à comprendre leur risque de développer le lupus. Un diagnostic précoce est également important car il permet d’initier un traitement en temps opportun et d’éviter des dommages irréversibles aux organes. À l’heure actuelle, de nombreuses personnes viennent nous consulter alors qu’elles sont à un stade très avancé, lorsque la maladie s’est déjà propagée à d’autres organes. Nous voulons travailler plus tôt avec ces patients et empêcher la progression de la maladie.
Quelles complications peut-on craindre en cas de diagnostic tardif?
Il y a les complications liées à la maladie elle-même et les complications qui résultent d’un lupus non traité, qui apparaissent souvent en raison d’un diagnostic tardif ou des difficultés à traiter le lupus. Les complications de la maladie peuvent inclure des éruptions cutanées et des problèmes de cicatrisation, ainsi que des complications cardiaques, pulmonaires, rénales et cérébrales qui peuvent être très graves. Dans le passé, avant l’apparition de traitements efficaces, de nombreux patients mouraient de la maladie. Lorsque la maladie n’est pas bien contrôlée, les risques d’infections, d’infarctus, d’accident vasculaire cérébral et de cancer augmentent. Ils ne sont pas dus au lupus, mais à une inflammation incontrôlée de l’organisme au fil des années.
Que peut-on attendre de la recherche sur le lupus?
Même si le lupus se manifeste par des symptômes différents, le système immunitaire est au cœur du problème. Il est la cause des nombreuses réactions inflammatoires. D’autres recherches doivent être menées pour nous aider à comprendre les réactions inflammatoires liées au lupus, et les raisons de l’inflammation et de la dérégulation. Ces connaissances pourront être utilisées pour identifier de nouveaux médicaments ciblant cette partie du système immunitaire et pour peut-être trouver un remède.
Vous voulez en savoir plus sur les recherches de la Dre Choi sur le lupus.
Regardez l’épisode 14 de la série Éducation consacré à la recherche sur l’arthrite.